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28/04/2013

La tragique destinée d'un "Volontaire" Lorrain

La période révolutionnaire en Lorraine ne fut pas aussi sanglante que le furent les mitraillages de Lyon, le soulèvement contre-révolutionnaire de Toulon et le génocide de la Vendée, pour les raisons que nous avons déjà évoquées sur notre site, et notamment dans le billet "Lorrains et Alsaciens dans les guerres de l'Ouest".

En dehors de l'épisode de Verdun en 1792, les exécutions qui eurent lieu dans le pays natal de Stofflet, ne furent pour la plupart que des cas de résistance très isolés. Néanmoins les condamnations qui s'en suivirent, faisaient preuve d'une violente sévérité qui ne s'explique que par l'état d'esprit qui régnait alors et par l'influence des éléments extrémistes républicains, qui, comme partout ailleurs ont exercé une pression souvent décisive.

En 1792, la république naissante avait fixé le nombre d'hommes à réquisitionner par département pour la défense de la patrie (révolutionnaire) en danger.

Cinq bataillons ont été formé pour le seul département de la Meurthe, Bernard Saint Mihiel fut affecté comme lieutenant à la 7ème compagnie du 4èm bataillon. Mais qui était donc cet homme ? Bernard Saint Mihiel est né le 30 novembre 1770, son père était avocat à la cour et résidait à Haroué. Il s'était engagé en 1788 au régiment du roi et se destinait à être chirurgien militaire.  Après les troubles de Nancy en 1790, il fut renvoyé dans ses foyers. Le 23 août 1791 sa qualité de militaire lui valut d'être réquisitionné pour la défense de la patrie (révolutionnaire) en danger. Il assista à quelques combats, en particulier au siège de Thionville, puis il revint à Nancy avec son bataillon ou il prit la décision de quitter l'armée. Bernard Saint Mihiel fit part à l'une de ses cousines, des raisons de ce changement spontané dans son existence. Cette missive qu'il écrivit à cette proche parente, devait avoir pour notre "Volontaire" des conséquences terriblement fâcheuses que nous la reproduisons ci-dessous :


Ma chère et bonne cousine,

Je suis arrivé, il y a à peu près un mois de l'armée de Moselle où j'ai quitté pour tout-à-fait le bataillon de volontaires où j'étais : j'ai donné ma démission pour plusieurs raisons et vous ne doutez point que je n'ai jamais pensé ni eu les sentiments et les principes de cette charmante Constitution et jolie liberté qui fait commettre tous les jours des horreurs et des abominations envers les honnêtes gens : n'osant encore rien dire de tous les forfaits qui se commettent ici tous les jours. Je vous dirais que j'ai pris le parti de me mettre dans un régiment de ligne qu'est le 58èm régiment d'infanterie, ci-devant Rouergue, et suis au dépôt du 2èm bataillon. L'officier qui commande m'a gardé avec lui ayant besoin de quelqu'un pour le seconder dans sa besogne. Comme faisant les fonctions de quartier maître, je travaille avec lui au bureau et il m'a nommé provisoirement caporal fourrier pour me mettre à l'abri de tout, par conséquent m'exemptant de tout service, je veux dire de monter la garde et de partir pour l'armée. Je suis avec un fort aimable homme rempli de bonté pour moi et ayant les meilleurs intentions pour m'obliger : je me trouve cent fois plus heureux que d'être avec tous ces pétras de Volontaires et officiers très ambitieux, cherchant tous les moyens pour vous faire arriver de la peine. J'ose croire que ma tante ne sera pas fâchée du parti que j'ai pris et ose espérer de me donner connaissance de ce que vous en pensez par une réponse que vous aurez la bonté de me faire : c'est en attendant avec impatience l'instant où j'aurai le plaisir de recevoir de vos nouvelles ainsi que de ma bonne tante que je suis et serai pour la vie.

Votre bon cousin et ami

Saint Mihiel


Hélas notre "Volontaire" n'avait pas imaginé que son courrier pouvait être lu et tomber dans les mains de quelques esprits malintentionnés... Sa lettre fut transmise au comité de surveillance de Nancy composé de plusieurs "citoyens" dont le Bordelais Philip et d'un autre étranger Mauger, qui avait transformé son nom en celui de Marat-Mauger, ce qui indiquait très nettement ses accointances politiques, les autres membres de ce tribunal inique avaient été choisi parmi les révolutionnaires les plus extrémistes de la région. Ce comité de surveillance procéda à l'arrestation de Bernard St Mihiel ; il était accusé d'être contre-révolutionnaire, ennemi de la constitution et de la Révolution : mis au arrêt le 19 novembre 1793, il subira son premier interrogatoire le 2 janvier 1794. Transféré par la suite à Paris pour être jugé devant le Tribunal révolutionnaire (et l'on sait comment fonctionnait ce Tribunal vis à vis de ceux qui tombaient dans ses rets).

L'acte d'accusation rédigé par Fouquier-Tinville fut produit le 4 juin 1794, Bernard St Mihiel comparut avec 9 autres détenus dont une femme : celle-ci fut acquittée. Notre "Volontaire de Lorraine", sans avocat pour assurer sa défense fut condamné à la peine de mort ainsi que les autres accusés. L'exécution de la sentence eut lieu le jour même.

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La statue du "Volontaire", à Remiremont.

Commentaires

Une douloureuse page d'histoire régionale qui fait suite aux autres et, qui démontre la rouerie des républicain. Je lis toujours avec grand plaisir vos écrits, car mon Père était natif de Racécours - Pour Dieu et le Roi

Écrit par : vernier | 29/04/2013

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